Le musicologue Frédéric Platzer vient de publier un intéressant ouvrage aux éditions Ellipses. «Le Top 100 du jazz» ne constitue pas une sélection des 100 meilleurs albums du genre, mais, de manière beaucoup plus pointue, une présentation détaillée des 100 standards les plus marquants selon l’auteur. Car l’histoire du jazz, qui se partage entre tradition orale et écrite, et qui fait la part belle à l’improvisation, est aussi pavée de nombreux morceaux historiques et puissamment codifiés, que les formations aiment à réinterpréter. Ces fameux standards issus de la tradition populaire, de comédies musicales, parfois extraits du répertoire de variété ou encore composés par les jazzmen eux-mêmes, et qui ont au fil du temps acquis le statut d’hymnes.
L’auteur se livre donc ici à un décryptage fin de ces morceaux, présenté sous forme d’une double page pour chaque standard qu’il a jugé opportun d’inclure dans sa sélection. L’approche est bien documentée, et s’attache à dégager quand et comment ces morceaux choisis sont devenus des standards. Elle résume sous la forme de petits paragraphes le contexte historique de chaque enregistrement, le rappel de la formation musicale impliquée, la structure et le plan des thèmes musicaux du morceau (extrait de partition à la clé), des informations et anecdotes liées à l’album dont il est extrait.
Cette sélection, forcément subjective, fait la part belle à de nombreux titres écrits ou repris autour des années 60, mais cite également des versions de millésimes bien antérieurs (l’incontournable «In the mood» de Glenn Miller (1939), dont le thème remonte à 1929), et des titres beaucoup plus récents tels que le «Little Piece in C for U», composition de Michel Petrucciani (dans sa version solo de 1998) ou le «Yesterdays» enregistré par le trio Jarrett/Peacock/De Johnette en 2001, près de soixante dix ans après sa création.
Il s’agit donc d’un véritable guide d’écoute et de (re)découverte de ces morceaux, dont certaines versions originales remontent au tout début du siècle dernier, utile à celles et ceux qui souhaiteront comprendre leur histoire. On pourra juste adresser à cet ouvrage le petit reproche de ne pas inclure d’illustration (pochettes d’album ou photos de musiciens) et de présenter une table des matières uniquement classée par ordre alphabétique de titre des standards. Des entrées complémentaires par noms d’artistes, titres d’albums et dates (des versions originales ou des reprises) n’auraient peut être pas été inutiles.
A noter que F. Platzer est également l’auteur, entre autres ouvrages, du «Top 100 du Classique», aux mêmes vertus didactiques et construit selon le même esprit.